La lettre du réseau éco-consommation (association belge) parle ce mois-ci des noix de lavage.
Comme beaucoup de laveuses de couches en utilisent, en toute bonne foi, comme lesive respectueuse de l'environnement, j'ai trouvé intéressant de vous faire part de leur réflexion...
Ca fait réfléchir.
Extrait de
L'Art d'éco-consommer
la newslettre du réseau éco-consommation
Numéro 13 [mars 2006] - dossier <noix de lavage>
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Les noix de lavage sont-elles propres ?
Les noix de lavage - que l'on met dans la machine pour laver son linge - sont devenues fort à la mode mais posent un certain nombre de problèmes si on les met dans le bon contexte, c'est-à-dire en analysant leur impact de manière globale.
D'où viennent-elles ?
Les noix de lavage proviennent essentiellement de l’Inde et du Népal. Dans ces pays, les arbres non ligneux (qui ne sont pas exploités pour leur potentiel de production de bois) et dont l’arbre à savon (Sapindus mukorossi) fait partie, sont utilisés avant tout pour améliorer l'état nutritionnel et sanitaire des populations locales. La commercialisation locale apporte des produits de première nécessité pour les ménages mais ces arbres apportent également du fourrage, de l'ombre, permettent la conservation et l'amélioration des sols etc.
La cueillette des produits forestiers est pratiquée par tous les habitants des villages environnants. C'est une activité pratiquée particulièrement par les femmes et les enfants. Les noix sont donc utilisées par les populations locales. La production dépend de la conjonction des facteurs climatiques et anthropiques, qui peuvent être aussi défavorables (déplacement des populations, croissance des besoins en terres agricoles, exploitation abusive du bois-énergie), dont l’ensemble peut, dans certains cas, entraîner une dégradation continue des ressources forestières.
Et ça lave ?
Les noix de lavage sont en réalité capables de laver des vêtements propres. Dit de manière moins radicale, ces noix sont efficaces pour laver du linge sale d'avoir été porté. Elles sont cependant peu efficaces contre les vraies taches. Il faut alors ajouter des agents de blanchiment, un détachant ou des huiles essentielles (pour l'odeur ""de propre"") pour avoir un résultat qui approche celui d'une lessive classique selon Test-Achats. Bien entendu, dans ce cas, c'est tout de suite moins intéressant.
Et l'environnement dans tout ça ?
A notre connaissance, il n’y a pas données sur la toxicité des rejets de lavage. Le détergent naturel contenu dans les noix étant la saponine, il ne pose pas de problème de dégradation comparé aux tensioactifs d'origine pétrochimique tels que les LAS (alkylbenzènes sulfonates) utilisés dans les lessives classiques. De plus, les noix de lavage ne contiennent pas les innombrables additifs que l'on retrouve dans les produits "classiques". Il faut cependant signaler que la saponine a un effet lavant mais pas blanchissant, ce qui pose problème à de nombreux utilisateurs occidentaux compte tenu des critères de propreté de nos latitudes.
En principe, il s'agit bien d'une alternative écologique aux lessives traditionnelles. Mais... analysons les autres implications de l'utilisation d'un tel produit.
Que se passe-t-il si nous, Européens, devenons consommateurs de noix de lavage ? La situation déjà fragile de ces écosystèmes risque d’empirer par une exploitation abusive due à la méconnaissance ou à l'indifférence.
L'exploitation des noix de lavage n'ont pas fait l'objet d’études d'inventaire forestier aux fins d'aménagement et d'exploitation de la forêt. Les produits qui ont connu un soudain succès d'intérêt économique comme le karité, la spiruline ou le gommier ont eu besoin d’une gestion rationnelle de la ressource. Il faut que les différents acteurs prennent conscience de la nécessité de préserver les équilibres locaux.
Si la demande augmente et que les populations locales se voient privées de noix pour leur propre usage, quelle solution leur reste-il ? Des lessives en poudre ? C’est peut-être une extrapolation, mais le risque existe !
Commercialisation du produit
Nous avons peu d’informations (et encore moins de garanties !) sur les conditions de production des sacs de noix qu’on achète. Nous ne savons pas réellement si les personnes qui ont fait la cueillette sont rémunérées correctement, ni si cette cueillette est gérée de façon intégrée, ni dans quelles conditions sanitaires les noix ont été conditionnées. Les noix peuvent-elles moisir pendant le transport ou le stockage ? Si c’est le cas, cela peut-il nuire à notre santé ?
Récemment, on assiste à l’apparition de marques de noix de lavage qui s’inscrivent dans la démarche du commerce équitable. Ne portant pas de label internationalement reconnu, comment s’assurer de la véracité de leur revendication et de son indépendance ?
De nombreuses questions sont en attente de réponse et la prudence s’impose.
Penser globalement pour agir localement
Parcourir la moitié du globe au nom d’un nettoyage écologique, ce n’est pas vraiment une fleur que l’on offre à l’environnement. A l’heure où le secteur des transports est pointé du doigt pour être l’un des majeurs responsables des émissions des gaz à effet de serre, il vaut mieux réfléchir à nos choix de consommation.
Pourtant, des alternatives près de chez nous existent ! On peut trouver dans les rayons des copeaux de savon de Marseille multiusages qui donnent un résultat de lavage très satisfaisant. La composition est simple, hypoallergénique et respectueuse de l’environnement. Des marques engagées dans le respect de la santé et de l’environnement commercialisent également des produits répondant à des critères de fabrication et de formulation qui méritent notre attention (par exemple : Sonett, Ecover, Biotop, Disana…). Elles sont souvent produites dans notre pays ou ses voisins et sont totalement indépendantes des marques multinationales qui monopolisent le marché.
Et finalement, j'achète quoi ?
Les noix de lavage lavent de manière écologique mais avec une efficacité limitée en les utilisant telles quelles. Si l'on ajoute à cela les incertitudes qui planent sur leur production, on se retrouve devant un produit qui comprend encore trop d'inconnues. Il restera toujours, de plus, le problème du transport. Faire venir de très loin un produit écologique n'est pas très cohérent.